Texte par Stephanie Mercier Voyer
Images par Steve Walsh
 

Il suffit de jeter un coup d’œil aux publications de Marc Angelo Coppola sur les médias sociaux pour se rendre compte qu’il n’est pas un agriculteur typique. Ses vidéos le montrent généralement affublé d’un casque-microphone, s’exprimant sur des sujets allant de la valeur nutritive des aliments à l’agriculture. À première vue, vous pourriez confondre cet homme de 33 ans avec un producteur de balados, et non avec un cultivateur qui prend un vif plaisir à faire pousser de l’ail. Marc partage ses semaines chargées entre Montréal et la ferme Valhalla, un projet agricole communautaire de 88 acres qu’il a développé en périphérie de la ville.

C’est lors d’une rencontre en visioconférence que Marc m’explique avec enthousiasme son style de vie, se décrivant lui-même comme un homme ayant un pied profondément planté dans la terre et l’autre fermement ancré dans les pavés d’une ville animée. C’est exactement cette dualité qui permet à Marc d’explorer de nouvelles approches en agriculture tout en s’appuyant sur les réseaux sociaux pour élargir sa communauté. Ayant grandi en banlieue, Marc a très peu été exposé à l’agriculture durant son enfance. Il y est arrivé bien plus tard, comme entrepreneur. À seulement 18 ans, il investissait déjà dans une première entreprise, un skatepark intérieur, qu’il gérait pendant qu’il terminait un baccalauréat en marketing et entrepreneuriat à l’Université McGill. Pendant ses études, il se met au défi de regarder un documentaire par semaine, pendant une année, pour développer ses connaissances générales. Il réalise alors que, même si plusieurs de ces films permettent d’exposer des problèmes tels que le changement climatique, la surexploitation ou la violence, ils ne proposent que rarement des solutions concrètes. Il a eu un déclic.

Au moment d’obtenir son diplôme, Marc avait déjà vendu à profit son entreprise de skate- park et lancé deux agences médias. Puis, en avril 2012, il visite un terrain à vendre, à 20 minutes du centre-ville de Montréal : « Je me suis promené au milieu de ce terrain plat où l’on cultivait du maïs et du soja génétiquement modifiés depuis des générations. Plus rien n’y poussait. J’ai décidé d’y planter un arbre et d’y bâtir une communauté. » C’est comme cela que le projet de la ferme Valhalla a vu le jour. Marc n’avait que 23 ans lorsque lui et ses amis ont quitté le sous-sol familial pour s’installer dans une maison à proximité de la ferme afin de réaliser leur rêve.

Cette nouvelle aventure est entièrement documentée sur les médias sociaux. Petit à petit, la communauté Valhalla commençait à grandir en même temps que la popularité de ses publications sur les réseaux. La première année d’exploitation s’est avérée beaucoup plus exigeante que prévu. Marc n’avait jamais fait de formation en agriculture, n’avait pas de mentor et travaillait toujours à temps plein dans son agence en ville. Il se sentait dépassé — mais plus ses vidéos étaient visionnées, plus il rencontrait du monde qui voulait travailler avec lui. Il s’est rapidement entouré de personnes qualifiées en agriculture qui ont permis de planter des centaines d’arbustes de lavande et de petits fruits. Malheureusement, la majorité de ceux-ci n’ont pas tenu le coup face à l’inondation qui a sévi sur la ferme cette première année — un incident causé en partie par un système de drainage déficient. Cet épisode n’a pas découragé ce groupe d’optimistes qui ont poursuivi le travail vers leur but commun : redonner la vie à une terre endommagée par des années de monoculture et d’épandage intensif de produits chimiques.

« J’ai décidé que je devais m’impliquer. Pour moi, la solution était de construire le centre de formation que j’aurais aimé fréquenter physiquement et numérique- ment et de construire une communauté dans laquelle j’aurais voulu m’épanouir. »

Marc se lance alors dans l’étude des principes de la permaculture dans le but d’apprendre à planter d’une manière qui respecte les écosystèmes naturels du sol et renforce la biodiversité. Ses amis et lui démarrent une pépinière d’arbustes et d’arbres fruitiers, incluant cerisiers, pommiers, poiriers et pruniers, et plantent, entre autres, de l’ail, de la laitue et des tomates. Ils installent également des ruches et commencent l’élevage de poulets sur la propriété. Petit à petit, le sol et la terre reviennent à la vie.


La communauté s’est ensuite tournée vers la construction d’infrastructures, dont un géonef (un type de construction durable fait à partir de matériaux recyclés et naturels), des serres et un hangar à outils alimenté par des panneaux solaires. Très vite, des colonies de chauves-souris ont commencé à fréquenter Valhalla et à s’alimenter des moustiques générés par la création d’étangs. Des chevreuils et même des couleuvres se sont eux aussi frayé des chemins sur le terrain de la ferme.

Aujourd’hui dans la 10e année d’activité, Valhalla fonctionne comme une coopérative : « C’est une communauté d’agriculteurs, de producteurs, de membres et de supporteurs », explique Marc. La structure de coopérative de Valhalla permet aux particuliers ainsi qu’aux entreprises de se regrouper et de partager la propriété pendant que des experts se chargent des opérations quotidiennes.


Selon Marc, la plupart des agriculteurs doivent maximiser leur production afin de survivre et de faire des profits. Avec le modèle coopératif, il espère pouvoir construire une stabilité financière, notamment grâce aux abonnements, ce qui lui permettra de se concentrer sur la communauté plutôt que sur la production : « Certains membres de Valhalla sont des ouvriers qui contribuent au travail manuel sur la ferme, tandis que d’autres sont producteurs (experts ou agriculteurs exploitant leur propre entreprise sur le terrain). Puis, il y a les membres considérés comme des “appuis”, c’est-à-dire qu’ils ne travaillent pas à la ferme, mais ils y investissent du temps, de l’énergie et des ressources pour soutenir le projet. » Les membres peuvent également siéger au conseil d’administration et gérer la coopérative : « Nous préconisons l’entrepreneuriat afin que les individus puissent gérer leur propre microentreprise au sein même de la communauté », souligne-t-il.

Marc est conscient que beaucoup ne peuvent financièrement investir dans une ferme sans savoir au préalable si l’agriculture leur convient. C’est pourquoi il espère que le modèle d’adhésion à la coopérative rendra l’agriculture accessible à un maximum de personnes curieuses d’en apprendre plus sur cette manière de vivre et de cultiver.

 

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Joignez-vous à la mission de Marc et faites partie de la communauté ici.

 

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*Ici adapté pour le web. Tu peux lire l'article complet dans la quatrième edition du Magazine Growers & Co.
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