Texte par Émélie Bernier

À Saint-Michel-de-Bellechasse, l’Herboristerie La Maria est un îlot de verdure dense et fleuri qui contraste avec les champs uniformes piqués de fosses à purin et striés de haies brise-vent maigrichonnes qui l’entourent. Marie-Hélène Noël, qui donne son nom à la ferme, cultive sa terre comme un grand jardin, un écosystème dont le cœur pulse au rythme des saisons et où les plantes, fleurs et arbres aux vertus médicinales ont le champ libre !

Certains apprennent les noms d’oiseaux ou les capitales du monde par cœur, Marie-Hélène Noël a appris toute jeune les noms des végétaux qui poussaient autour de chez elle. Aujourd’hui, elle récolte, transforme et rend accessibles le framboisier, la rose, l’achillée millefeuille, la verge d’or et leurs consoeurs : « enfant, j’ai eu la chance d’avoir un voisin biologiste qui m’avait montré comment faire un herbier. J’ai appris les noms de plantes en immersion, sans trop m’en rendre compte. Pour moi, elles ont toujours eu un nom ! »

Des années plus tard, Marie-Hélène s'intéressa de plus près à leurs propriétés médicinales : « c’est drôle, mais c’était un peu comme si on me racontait des potins sur mes copines. Je rajoutais des couches d’information sur des êtres vivants, connus et nommés », rigole-t-elle. Marie-Hélène choisit alors d’étudier l’agronomie à l’université et continue ainsi d’explorer les  liens entre l’humain et son environnement : « les familles de mes deux parents étaient agriculteurs. Même si je n’ai pas grandi dans une ferme, je viens du tissu culturel agricole où le travail collectif, l’entraide et les corvées vont de soi ! Je pense que cet héritage m’a rendu capable d’avancer dans le travail sans me sentir débordée. J’aime le travail physique, poser des gestes et voir les résultats. »   

Durant ses études, elle s’exile pour une année d’études au Mexique. Le déclic pour l’herboristerie aura lieu au pays des Aztèques : « j’y ai rencontré des herboristes et des professeurs qui m’ont ouverte à cette façon particulière d’être en relation avec la nature. C’est très spontané, dans la culture autochtone mexicaine, d’aller vers le milieu naturel pour se soigner. » À son retour, et à peine son diplôme obtenu, Marie-Hélène a eu un coup de cœur pour une immense terre à Saint-Michel-de-Bellechasse et en fait l’acquisition. Une bleuetière, des champs de fraises, une érablière et beaucoup d’hectares atterrissent entre leurs mains : « j’étais peu consciente du défi - si j’en avais compris l’ampleur, est-ce que je l’aurais fait ? En tant qu 'agronome, je savais qu’avec cette qualité du sol, je serais capable de faire pousser quelque chose », résume-t-elle.
 

« Je suis motivée par l’idée que si les gens connaissent le plaisir et les bienfaits que peut leur apporter une plante, qu’ils apprennent à l’aimer, alors ils vont y faire attention. »

Dès l’acquisition, Marie-Hélène Noël a abordé sa terre comme un grand jardin, un écosystème hétérogène dont la nature profonde devrait être encouragée : « j’ai toujours travaillé dans une optique de valoriser les plantes indigènes naturellement adaptées à notre climat et de les faire connaître. Je suis motivée par l’idée que si les gens connaissent le plaisir et les bienfaits que peut leur apporter une plante, qu’ils apprennent à l’aimer, alors ils vont y faire attention. C’est beaucoup plus facile de protéger ce qu’on connaît. J’aime travailler avec ce qui pousse au Québec tant pour l’autonomie médicinale que pour éviter de me battre contre le climat. »

En 20 ans, l’Herboristerie La Maria a supplanté le maraîchage dans le giron de la ferme. L’autocueillette de tomates italiennes, de poivrons rouges, de cerises de terre, de fines herbes et de fleurs coupées a remplacé les paniers de famille et cette offre est fortement appréciée :  « au début, je me disais que j’allais développer le volet herboristerie quand la ferme maraîchère serait rentable, mais j’ai eu besoin des plantes tout de suite. J’ai alors suivi des cours, et ma pratique a gagné en professionnalisme. La place des plantes, sauvages et cultivées, est devenue de plus en plus importante à la ferme, dans ma vie personnelle et dans mon travail. »

 

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*Ici adapté pour le web. Tu peux lire l'article complet dans le quatrième numéro du Magazine Growers & Co.
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