Text by Mali Navia
Les amateurs de vin nature vous diront haut et fort que ce type de vin sort des sentiers battus et se démarque par son goût excentrique. Il est créé grâce à un procédé artisanal qui laisse toute la place au goût du raisin en minimisant les interventions du vigneron, et chaque bouteille est une expérience unique.
Bien qu’il s’agisse d’un domaine d’agriculture qui demande beaucoup d’investissement, le milieu viticole du Québec regorge de projets plus novateurs les uns que les autres. L’entreprise Vignes en ville est un excellent exemple. Fondée en 2017 par Véronique Lemieux, cette parcelle de vigne urbaine permet de recycler des tonnes de verre tout en faisant du vin. Le principe est simple : on plante des vignes dans du verre broyé et on fait de l’économie circulaire.
Lieux Communs, c’est une entreprise viticole créée par Daniel Gillis, Guillaume Laliberté, Thibaud Gagnon et Laurent Noël, dont l’ambition principale est le partage des savoirs : « Le but initial de cette parcelle de vigne expérimentale était de nous amuser à faire notre propre vin et nous nous sommes très rapidement pris au jeu. Nous avons eu l’occasion de faire une cuvée collaborative au Domaine Le Grand Saint-Charles et cela nous a servi de laboratoire pour aller au bout de certaines idées », expliquent Daniel et Guillaume, tous deux sommeliers et copropriétaires de Lieux Communs. De cette association naissent en 2018 quelques cuvées qui ont rapidement trouvé preneur. La machine était partie !
Forts de leur succès et de leurs apprentissages acquis au cours de résidences dans différents domaines, les associés optent aujourd’hui pour une formule unique en son genre : une parcelle de vigne à Oka qui leur appartient, un chai à Montréal et des collaborations avec plusieurs vignerons : « Nous souhaitons diversifier les origines de nos raisins pour découvrir l’en- semble des personnalités des sous-régions du Québec », explique Guillaume Laliberté. Ce modèle d’affaires résout un des plus grands défis des nouveaux vignerons. Parallèlement à Vignes en ville, Véronique Lemieux rêve d’amener la viticulture à un autre niveau grâce à la polyculture. L’entrepreneure fait donc équipe avec Simon Naud, propriétaire et vigneron du Vignoble La Bauge, et Steve Beauséjour afin de démarrer la première parcelle de vigne en viticulture nordique régénératrice : « La viticulture épuise les sols, ce qui nuit aux rendements et au taux de survie des vignes et pousse au renouvellement de celles-ci tous les 15-20 ans. Ma force est de créer des écosystèmes et de valider l’empreinte écologique de différents projets. Les terres cultivables deviennent de plus en plus rares et les vignobles occupent beaucoup d’espace. L’idée est d’utiliser les espaces d’entre-rangs pour expérimenter des couvre-sols qui améliorent la qualité de la terre et augmentent la biodiversité», poursuit la fondatrice de Vignes en ville.« Pour faire du vin, la plupart des artisans doivent dabord preparer leur sol, ce qui peut prendre jusqu'à deux ans. »
Cette nouvelle manière de faire du vin verra le jour au Vignoble La Bauge, un endroit qui se démarque déjà par sa façon naturelle de faire les choses : «Au domaine, les alpagas et les moutons font du désherbage entre les vignes. Historiquement, c’était un lieu d’élevage avant d’être un vignoble. C’est un terrain de jeu féérique qui nous offre des possibilités infinies », confie-t-elle.
Géraldine Beaulieu, associée chez vinconseil, témoigne avec passion de l’essor que connaît l’univers du vin nature. En plus de représenter des producteurs étrangers, Géraldine et sa sœur Anne-Julie, accompagnent les vignerons du Québec au cours du développement de leurs compétences en communication et en marketing. Très présente sur le terrain, l’agence collabore entre autres avec les vignobles Charlevoyou et Côteau Saint-Paul en plus de gérer la stratégie de communication de la buvette de vins nature La Louve — Buvette gentille de Charlevoix.
Malgré la popularité croissante des vins nature québécois, il est parfois difficile pour le consommateur de mettre la main sur une bouteille. Si certains sont offerts à la SAQ, la plupart d’entre eux se vendent dans les épiceries fines, chez les cavistes ou encore sur des sites spécialisés comme La Boîte à Vins. De son côté, Steve Beauséjour a espoir de régler une partie du problème grâce au virage nature que fait le Vignoble La Bauge : « C’est un domaine de 14 hectares qui produit 60 000 bouteilles par an, et notre objectif est que ça ne soit plus si difficile d’en trouver une », dit-il.
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